MÉMOIRE
AU COMITÉ PERMANENT DES FINANCES DE LA CHAMBRE DES COMMUNES DANS
LE CADRE DE SES CONSULTATIONS PRÉBUDGÉTAIRES

VERS UNE POLITIQUE SCIENTIFIQUE
NATIONALE
POUR LE CANADA
Soumis par le Partenariat en faveur des sciences et de
la technologie
Le 5 septembre 2006
INTRODUCTION
Le Partenariat en faveur des sciences et de la technologie,
peut-être mieux connu pour sa série de petits
déjeuners-causeries organisés sur la Colline
du Parlement sous le titre « Petit-déjeuner avec
des têtes à Papineau », est une association
regroupant plus de vingt cinq organismes professionnels et
scientifiques. Il reflète des intérêts
scientifiques et technologiques diversifiés, allant
d’une vocation axée sur la recherche, l’innovation
et la capacité industrielle à la surveillance
des besoins en S-T pour l’élaboration de politiques,
en passant par l’encouragement des sciences dans le
milieu universitaire et dans l’administration publique.
Le PFST n’est pas un groupe de pression; il travaille
plutôt en partenariat avec le gouvernement pour faire
avancer la recherche et l’innovation dans l’intérêt
des Canadiens et des Canadiennes.
Dans les derniers mémoires soumis au Comité,
le PFST a insisté sur les possibilités et les
défis qui se présentent au milieu scientifique,
dont la formation de personnel hautement qualifié,
l’investissement dans la recherche du secteur privé,
la nécessité de la fixation de priorités
nationales pour l’investissement gouvernemental en S-T,
l’importance d’une capacité nationale de
recherche équilibrée, la commercialisation de
l’innovation et l’amélioration de la capacité
du Canada de participer à la recherche internationale.
Bien que le présent mémoire continue
d’insister sur un certain nombre de ces enjeux, le PFST
souhaite souligner la nécessité de donner priorité
à l’élaboration du cadre national de S-T,
initiative actuellement menée par Industrie Canada,
en collaboration avec le ministère des Finances.
CAPACITÉ EN S-T
La compétitivité à l’échelle
mondiale est fondamentale pour l’économie canadienne
et pour le mode de vie des Canadiens et des Canadiennes. Elle
suppose l’encouragement à l’innovation,
qui se traduira par une hausse de la production interne, puis
par la commercialisation de la production sur la scène
internationale. Nous nous laissons actuellement distancés
par les tendances internationales dans tous les domaines.
Comme l’a récemment déclaré Kevin
Lynch, greffier du Conseil privé, pour soutenir la
concurrence internationale, le Canada doit améliorer
sa productivité par le développement et l’application
d’activités de solutions en S-T . La capacité
de recherche et d’innovation dépend de facteurs
parmi lesquels un vaste bassin d’expertise, un climat
d’investissement propice et une capacité de convertir
l’innovation en retombées économiques
au Canada. Il faut que les réseaux collégiaux
et universitaires soient à même de saisir les
occasions et d’assurer une formation dans les nouveaux
domaines, afin de garantir l’offre de personnel essentiel
hautement qualifié. La prestation d’une expertise
plus humaine doit s’accompagner d’une capacité
accrue de transformer l’innovation en activité
économique; autrement, les personnes, les idées
et l’innovation quitteront le Canada. De plus, notre
capacité d’attirer de l’étranger
des experts hautement qualifiés s’érode
au fur et à mesure de l’établissement,
par ces pays, de leurs propres programmes. L’équilibre
entre les efforts du secteur public, du secteur universitaire
et du secteur privé nécessite la fixation et
la compréhension de priorités claires.
Cadre national des activités en S-T
Le Canada doit élaborer un cadre national cohérent
des activités en S-T qui lui permettra d’accroître
sa compétitivité. Cette initiative est menée
par Industrie Canada, en collaboration avec le ministère
des Finances. Nous sommes toutefois préoccupés
par le fait que plus ce processus prend du temps, moins il
sera probable que le Canada retienne les meilleurs cerveaux,
conserve la confiance de l’industrie et maintienne le
leadership dont il fait preuve actuellement. L’équilibre
à atteindre entre les nombreuses priorités concurrentes
en S-T qui confrontent le gouvernement peut compliquer la
tâche, mais l’avenir du Canada dépend de
sa capacité de production et de sa compétitivité
à l’échelle mondiale.
Le Canada a créé un nombre impressionnant d’outils
en S-T [comme la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI),
le Programme des chaires de recherche du Canada, Génome
Canada, la Fondation canadienne pour les sciences du climat
et de l’atmosphère, les Bourses d’études
supérieures du Canada et le Fonds d’appui technologique
au développement durable]. Il est maintenant temps
de faire le point, en examinant comment ces instruments récemment
créés s’incorporent aux programmes en
place (comme ceux des organismes subventionnaires, des Réseaux
de centres d’excellence, du Conseil national de recherches),
pour aborder la recherche et l’innovation au Canada.
Le gouvernement du Canada doit clairement énoncer un
cadre de responsabilisation et évaluer le rendement
de ses investissements en S-T, afin de fixer de nouvelles
priorités pour les investissements futurs. Il ne doit
toutefois centrer toute son attention sur les avantages appliqués
ou commerciaux seulement. Il est crucial de reconnaître
aussi la valeur éventuelle de la recherche fondamentale
en S-T qui sous-tend l’effort scientifique canadien.
Participation du secteur privé aux activités
en S-T
Une solide base nationale en S-T nécessite la contribution
de tous les secteurs : le milieu universitaire, les administrations
publiques et le secteur privé. Actuellement, il existe
au Canada un déséquilibre entre eux sur le plan
de la capacité de recherche et d’innovation,
de même que sur celui de l’infrastructure en S-T.
L’appui du secteur privé à la recherche
en S-T reste à la traîne des autres pays, en
particulier des États-Unis , alors qu’il faut
s’attaquer aux questions fondamentales relatives à
la difficulté de trouver du capital de risque au Canada
en vue de tirer parti des possibilités d’innovation.
À titre d’exemple, le Groupe d’experts
en commercialisation a évalué cette lacune et
s’est préoccupé de ce qu’en ce qui
concerne le financement au stade de l'expansion, l'investissement
moyen de capital de risque dans une entreprise américaine
atteint presque quatre fois le montant investi dans une entreprise
canadienne. Le Groupe a formulé des recommandations
à cet égard, y compris la création d'un
Superfonds pour la commercialisation et d'une Initiative canadienne
des partenariats entre PME de même que des mesures fiscales
portant sur l’investissement providentiel et le capital
de risque étranger. Il recommande aussi l’amélioration
des programmes actuels comme le Programme d'aide à
la recherche industrielle , le programme « De l'idée
à l'innovation » et le Programme de démonstration
des principes des IRSC , en plus du lancement, par le Conseil
de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH), d’un
programme semblable destiné à faciliter la commercialisation.
De plus, les Manufacturiers et exportateurs du Canada (MEC)
ont dernièrement recommandé le prolongement
de l’application du programme de crédit d’impôt
pour la recherche scientifique et le développement
expérimental pour qu’il couvre la première
étape de commercialisation des nouvelles technologies
. Ce programme attirerait de partout dans le monde du capital
de risque et du capital d’expansion du secteur privé
pour la commercialisation de nouvelles technologies, tout
en minimisant les frais d’administration et la fuite
éventuelle de recettes fiscales. Nous ajouterions que
le gouvernement devrait mettre sur pied un programme en vue
d’être le premier à adopter les nouvelles
technologies et les nouveaux services innovateurs, aidant
ainsi matériellement les petites entreprises à
tenter d’opérer une commercialisation réussie.
Capacité fédérale en R-D
Par contraste frappant avec le réinvestissement public
important fait dans l’infrastructure en S-T des universités
par l’entremise de la Fondation canadienne pour l'innovation
(FCI), le Conseil d’experts en sciences et en technologie
(CEST) a récemment constaté que l’appui
aux sciences gouvernementales est stable ou en baisse depuis
les vingt-cinq dernières années . Ainsi, la
capacité des ministères et organismes fédéraux
à vocation scientifique (MOVS) d’accomplir leur
mandat a été affaiblie. Il faut investir absolument
dans une nouvelle infrastructure de pointe dans tout le spectre
des activités gouvernementales en S T. Le défi
de taille à relever consistera à atteindre un
équilibre pangouvernemental coordonné entre
les priorités et les besoins concurrentiels des MOVS
fédéraux au cours du rétablissement de
cette capacité.
Capacité de surveillance des activités
de S-T à long terme
Bien des aspects fondamentaux des activités de S-T
sont soutenus par des programmes stables, à moyen et
à long termes, de surveillance scientifique, de collecte
de données et d’accès à des données
fiables de même que d’archivage de ces données.
De plus, certains domaines, comme la télédétection
par satellite, connaissent une circulation de données
sans précédent, ce qui exerce des pressions
énormes sur les capacités d’archivage
et d’accès. Ces aspects de la capacité
de surveillance à long terme dépassent le mandat,
la capacité et l’intérêt des chercheurs
dans les universités et dans les entreprises. Partout
au pays, de larges fossés se creusent dans les connaissances
scientifiques fondamentales, comme les critères environnementaux
de base, pour ne citer qu’un exemple. D’une part,
l’investissement dans la surveillance fondamentale des
variables scientifiques par le gouvernement fédéral
n’a cessé de diminuer, sauf en réaction
à des crises, comme les infestations de dendroctone
du pin ponderosa dans le centre de la C.-B. D’autre
part, on constate un surcroît d’intérêt
pour les ressources non renouvelables, comme le pétrole
et le gaz naturel, les minéraux et les hydrates de
gaz, qui devront être évaluées sur le
plan environnemental, politique et culturel. Les décisions
devront se fonder sur une politique rationnelle en matière
de sciences, de bourses d’études et d’intérêt
public. Les réponses s’appuyant sur une surveillance
insuffisante et sur la science des derniers moments comporteront
un risque élevé pour l’économie
de même que pour la population canadienne et son environnement
et compromettra le futur développement socio-économique.
Collaboration internationale en S-T
La capacité du Canada de participer à des programmes
internationaux en S-T est actuellement faible et dispersée.
Une forte participation permettrait au Canada d’accéder
à des ressources, à une expertise et à
une infrastructure qui, autrement, seraient inaccessibles
pour ses scientifiques et technologues. Toutefois, il faut
aussi que les décisions soient prises à temps,
pour que le Canada joue un rôle de premier plan dans
ces initiatives. Dans bien des domaines de l’entreprise
scientifique pourtant, il n’existe pas de mécanisme
pour garantir un financement initial, comme par l’entremise
de conseils subventionnaires. Il est essentiel que le Canada
crée une forme innovatrice de capital de risque de
démarrage pour établir et maintenir ses lettres
de créance internationales et pour tirer parti des
activités de S-T sur la scène mondiale.
RECOMMANDATIONS
Accélérer l’élaboration
d’un nouveau cadre national des activités en
S-T tourné vers l’avenir.
Nous proposons tout particulièrement que le gouvernement
du Canada :
• évalue la rentabilité de l’investissement
public canadien en S-T pour la société
et l’efficacité des mécanismes d’investissement
employés, afin de comprendre clairement la valeur reçue
en contrepartie des investissements déjà faits,
qu’ils aient été consacrés à
la recherche fondamentale ou à la recherche appliquée;
• mette en œuvre les recommandations du
Groupe d’experts en commercialisation et des Manufacturiers
et exportateurs canadiens, en vue de stimuler la
participation des entreprises à l’innovation
et au développement d’activités en S-T;
• commande un examen externe des rôles,
des fonctions, des atouts et des lacunes concernant la R-D
dans les laboratoires fédéraux, afin
d’élaborer une vision à long terme et
d’offrir des mécanismes visant à améliorer
les relations horizontales de travail et le renouvellement
de l’infrastructure nationale de S-T;
• soutienne des mesures garantissant la surveillance
de même que la collecte et l’archivage de données
à long terme, comme pour les critères
environnementaux de base, afin de fournir aux Canadiens et
aux Canadiennes les renseignements voulus pour arrêter
et appuyer des décisions d’orientation à
long terme;
• charge Industrie Canada du financement et
de la mise en œuvre de collaborations internationales
en S-T, dont l’établissement d’un
fonds de possibilités de collaboration avec l’UE
pour permettre aux Canadiens de participer comme partenaire
au Programme-cadre pour la recherche et le développement
1Gouvernement du Canada, Les gens et l’excellence
: au cœur du succès de la commercialisation, Rapport
final du Groupe d’experts en commercialisation, 2006.
2Kevin Lynch, « Le monde comme contrainte et comme cible
», Options politiques, avril-mai 2006, p. 12-17.
3OCDE, Principaux indicateurs de la science et de la technologie,
2002, Novembre 2005.
4Conseil national de recherches du Canada (CNRC), PARI.
5Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie
(CRSNG), De l'idée à l'innovation.
6Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), Programme
de démonstration des principes des IRS.
7Perrin Beatty, président-directeur général
des Manufacturiers et exportateurs canadiens, communication
à M. Jim Flaherty, ministre des Finances, 17 juillet
2006.
8CEST, LSNC : Les liens dans le système national de
connaissance (Février 2005).
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