Les Canadiens reconnaissent que leur santé, leur prospérité et leur sécurité dépendent de la science, de la technologie et de l’innovation (ST&I)1. Des outils que nous employons pour communiquer à l’énergie qui alimente nos foyers, nos entreprises et nos moyens de transport en passant par les traitements et diagnostics qui nous gardent en santé, les ST&I touchent tous les aspects de notre vie quotidienne.
La recherche fondamentale est à la base même des ST&I, dont elle assure la progression. De prometteuses percées surviennent lorsque nous avons l’occasion de répondre à des questions fondamentales à propos de nous-mêmes et du monde naturel qui nous entoure. Une recherche fondamentale soutenue est nécessaire à l’évolution constante des ST&I. Bien que le Canada soit depuis longtemps source de recherches à forte incidence de haute qualité, nous avons assisté dans les dernières années à une érosion de notre compétitivité par rapport à nos pairs étrangers. L’Examen du soutien fédéral aux sciences2 en témoigne, et les recommandations qui en découlent quant à la marche à suivre pour inverser cette tendance ont reçu un vaste appui de la communauté scientifique3 et du grand public4 .
Étant donné l’environnement mondial de plus en plus concurrentiel et la complexité des défis auxquels nous nous trouvons confrontés, les investissements dans la recherche fondamentale n’ont jamais été plus critiques pour les Canadiens. Compte tenu du rôle joué par la recherche pour ce qui est d’aiguillonner l’innovation et d’accroître la productivité et sa nécessité pour orienter l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes et inspirer la prochaine génération d’innovateurs, investir dans la recherche fondamentale est l’un des investissements les plus importants et les plus rentables que puisse faire notre gouvernement pour la compétitivité du Canada.

Le Partenariat en faveur des sciences et de la technologie (PFST) recommande que le gouvernement entreprenne la mise en oeuvre des recommandations de l’Examen du soutien fédéral aux sciences, en particulier :
• qu’il accroisse ses investissements dans la recherche fondamentale dirigée par les chercheurs indépendants, pour améliorer notre compétitivité sur le marché mondial (R6.1);
• qu’il accroisse ses investissements dans les programmes de subventions et de bourses afin d’assurer, pour l’avenir, une source stable d’innovateurs (R7.1).

INTRODUCTION

Le Partenariat en faveur des sciences et de la technologie (PFST) est une association de 26 organisations professionnelles et scientifiques représentant plus de 60 000 membres des mondes universitaire, industriel et gouvernemental. Il représente la communauté canadienne des sciences et du génie, et s’efforce de faire avancer la recherche et l’innovation dans l’intérêt des Canadiens. Le PFST est mieux connu pour sa série de déjeuners-conférences phares en sciences et génie à la Colline du Parlement, baptisée Petit-déjeuner avec des têtes à Papineau.

Le PFST présente une déclaration consensuelle fondée sur des consultations menées auprès de ses membres. Le présent mémoire est axé sur le thème de la productivité et de la compétitivité et les deux questions posées dans le cadre du processus de consultations prébudgétaires : 1) Quelles mesures fédérales aideraient les Canadiens à être plus productifs? et 2) Quelles mesures fédérales aideraient les entreprises canadiennes à être plus productives et compétitives?

1) La mise en oeuvre des recommandations de l’Examen du soutien fédéral aux sciences est importante pour le bien-être et la productivité de tous les Canadiens.
Une nation qui dépend des autres pour acquérir de nouvelles connaissances scientifiques fondamentales connaîtra de lents progrès industriels et occupera une faible position concurrentielle dans le commerce mondial, peu importe ses compétences mécaniques.
– Vannevar Bush, rapport de juillet 1945 au président des États-Unis, Science, The Endless Frontier.
(Repris dans l’Examen de soutien fédéral aux sciences)

Nonobstant le fait que la science fondamentale vise à nous comprendre nous-mêmes et à comprendre notre monde naturel sans tenir compte d’un quelconque produit final, il a été établi à maintes reprises que ce type de recherche mène à des applications pratiques transformatrices. La recherche émanant de chercheurs canadiens ne fait pas exception à la règle. Il a par exemple fallu des années de recherche fondamentale en vue de comprendre les propriétés uniques du virus Ebola pour parvenir à créer un vaccin. La recherche fondamentale visant à comprendre les mécanismes sous-jacents de l’intelligence et de la cognition a mené à l’« apprentissage en profondeur » duquel est issue l’intelligence artificielle (IA) dans tout – des voitures intelligentes à la finance. La promotion d’un environnement de recherche fondamentale vigoureux est essentielle à la génération des idées qui alimentent la recherche appliquée et stimulent l’innovation.

Les Canadiens s’enorgueillissent de l’étendue des avancées découlant de nos recherches, du développement de l’insuline à la compréhension des neutrinos. Depuis 2000, cependant, notre compétitivité en recherche décline, non seulement par rapport aux puissances traditionnelles comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne, mais aussi par rapport à de plus petites nations comme l’Australie et les Pays-Bas. L’Examen du soutien fédéral aux sciences a révélé qu’un financement insuffisant de la recherche fondamentale au cours d’une grande partie de la dernière décennie y est pour beaucoup2. Cette érosion du soutien à la recherche fondamentale a mené à une dégringolade du nombre de chercheurs se consacrant à des travaux fondamentaux5. Notre capacité à générer les nouvelles idées qui amélioreront le bien-être et la productivité des Canadiens a diminué, tout comme notre capacité à attirer, à former et à retenir les brillants chercheurs dont nous avons besoin pour nous démarquer dans l’économie du savoir et faire croître notre classe moyenne. Pour inverser cette tendance, un réinvestissement important dans le financement en recherche fondamentale s’impose.

L’actuel gouvernement a déjà exprimé sa volonté d’appuyer la recherche fondamentale par l’attribution – très bien accueillie et combien nécessaire – de 76 millions de dollars supplémentaires aux trois conseils dans le Budget 2016. L’Examen du soutien fédéral aux sciences a procuré une feuille de route quant aux prochaines étapes dans la reconstruction de notre écosystème de recherche. Le PFST appuie entièrement les recommandations formulées dans le rapport à l’intention du gouvernement, appelé à « accroître rapidement ses investissements dans la recherche dirigée par les chercheurs indépendants afin de redresser le déséquilibre causé par des investissements priorisées qui ont favorisé la recherche axée sur les priorités ». (R.6.1)

2) La mise en oeuvre des recommandations de l’Examen du soutien fédéral aux sciences aidera les entreprises canadiennes à être plus productives et compétitives.

En plus des idées qui constitueront les avancées et les produits de demain, le plus précieux des fruits de la recherche fondamentale est le talent. Le perfectionnement par la participation à ce type de recherche améliore notre capacité à innover à l’échelle mondiale dans tous les secteurs, sans nous limiter au milieu universitaire. Les chercheurs canadiens forment non seulement la prochaine génération de chercheurs de calibre mondial, mais aussi les travailleurs qualifiés, les innovateurs et les chercheurs chevronnés vers lesquels se tourneront les entreprises canadiennes pour augmenter leur productivité et devenir plus compétitives. Pour résister à la concurrence internationale dans l’économie du savoir, les entreprises canadiennes ont en effet besoin de talents diversifiés capables de comprendre et de poser des questions fondamentales et d’adopter une vision d’ensemble, curieux, et animés par une passion pour l’innovation. Les compétences acquises dans le cadre de la recherche fondamentale nous outillent pour générer de nouvelles idées, de nouveaux produits, de nouvelles approches, de nouvelles politiques, etc. reposant sur de solides preuves, analyse et prise de décisions. L’investissement dans la recherche est donc aussi un investissement dans une filière de formation qui générera des emplois et des talents pour répondre aux besoins économiques et sociaux du futur.

Malheureusement, le déclin du financement de la recherche fondamentale tout au long de la dernière décennie a eu une incidence négative sur le recrutement de stagiaires dans les disciplines de recherche6. L’augmentation du financement de la recherche fondamentale dirigée par des chercheurs indépendants, en plus d’accroître le nombre de stagiaires que chaque chercheur peut accueillir, enrichira aussi leur environnement de formation. Combinée à la revigoration des programmes de subventions et de bourses dont dépendent de nombreux stagiaires, elle servira à établir le Canada en tant que pôle d’attraction des plus grands talents au monde, enrichissant notre contribution à l’innovation sur la scène mondiale.

Pour aider à recruter et à conserver les plus grands talents canadiens et étrangers, le PFST recommande que le gouvernement mette en oeuvre les recommandations de l’Examen de soutien fédéral aux sciences, y compris l’accroissement du financement de la recherche fondamentale dirigée par des chercheurs et l’augmentation des subventions et des bourses offertes aux stagiaires (R7.1). Ces mesures devraient être accompagnées d’efforts visant à améliorer la diversité des stagiaires, s’inscrivant en complément aux autres efforts déjà déployés par ce gouvernement pour faciliter le recrutement de talents (de récents changements au programme de visa pour les travailleurs qualifiés, par exemple7). L’investissement en question aidera les entreprises canadiennes à court terme, contribuant à la génération des talents qui leur permettront de croître et d’innover, de même qu’à long terme, en générant les idées qui mèneront aux produits du futur.

CONCLUSION
Le milieu de la recherche en science et en génie est unanime : au fil du temps, l’érosion du soutien à la recherche fondamentale étouffe le foisonnement d’idées qui stimulent l’innovation et assèche le bassin de jeunes innovateurs qui assureront la compétitivité du Canada pour les années à venir. Les Canadiens dans leur ensemble ont reconnu l’importance de la recherche fondamentale pour la prospérité de notre nation1. L’exécution de l’Examen du soutien fédéral aux sciences a signalé l’engagement du gouvernement à restaurer la recherche fondamentale au Canada. Ce gouvernement a une occasion unique de mettre un frein au déclin de notre
compétitivité à l’échelle mondiale et de se repositionner en tant que chef de file de la recherche. Le PFST presse le Comité permanent des finances de la Chambre des communes d’entreprendre la mise en oeuvre des recommandations de l’Examen du soutien fédéral aux sciences et de réinvestir dans la recherche fondamentale dirigée par les chercheurs indépendants au bénéfice de tous les Canadiens.

1) Le comité d’experts sur l’état de la culture scientifique au Canada (2014) Conseil des académies canadiennes. http://sciencepourlepublic.ca/uploads/fr/assessments%20and%20publications%20and%20news%20releases/science-culture/scienceculture_fullreportfr.pdf
2) L’examen du soutien fédéral aux sciences (2017) http://www.examenscience.ca/eic/site/059.nsf/vwapj/ExamenDuSoutienScience_avril2017-rv.pdf/$file/ExamenDuSoutienScience_avril2017-rv.pdf
3) Voir par exemple : https://supportthereport.ca/
4) Voir par exemple : https://www.thestar.com/opinion/editorials/2017/07/03/trudeau-government-must-invest-in-basic-science-editorial.html
5) Restoring Canada’s Competitiveness in Fundamental Research : The View from the Bench (2017) Global Young Academy. https://globalyoungacademy.net/wp-content/uploads/2017/06/GYA-2017-FundResearchReport-LoRes.pdf (section 4.3)
6) Ibid (section 4.7)
7) Voir par exemple : https://www.theglobeandmail.com/report-on-business/rob-commentary/canada-cant-fall-behind-in-the-global-race-for-tech-talent/article35459472/